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Au début du mois d’octobre, la Commission canadienne du lait (CCL) doit publier les résultats de son étude annuelle des coûts de production. La variation estimée des coûts de production et le taux d’inflation mesuré à partir de l’indice des prix à la consommation entrent dans la Formule nationale d’établissement des prix pour déterminer l’ajustement annuel des prix du lait à la ferme, généralement appliqué en février de l’année suivante. Cette page décrit la procédure pour 2023.

Dans ce billet, je débute en examinant l’ajustement des prix que les producteurs laitiers canadiens peuvent s’attendre en février 2025. Selon mes calculs, il est possible que la CCL baisse le prix du lait d’environ 2%. La dernière fois que le CCL a baissé le prix du lait, c’était en 2015. Par la suite, je fais des prédictions des prix du lait à la ferme par province à l’aide de données de Statistique Canada, en supposant que la CCL réduira les prix du lait à la ferme de 2 % en février 2025.

En février dernier, j’ai écrit à propos des prix du lait à la ferme au Québec. Mes prévisions étaient que les prix du lait à la ferme au Québec diminueraient jusqu’en septembre, puis augmenteraient à l’automne. Ce n’est pas ce qui s’est passé, les prix à la ferme étant plus élevés que mes prévisions. Je suis heureux de ce résultat puisque les agriculteurs se portent mieux que ce que mon modèle prédisait. J’ai quelques indices sur la raison pour laquelle mon modèle prévoyait des prix plus bas. Plus d’informations à ce sujet dans la dernière section de ce billet.

Baisse des prix à la ferme en février ?

La CDC publie généralement au début d’octobre les résultats de son étude annuelle sur les coûts de production. La Formule nationale d’établissement des prix détermine l’ajustement annuel des prix du lait à la ferme en faisant la moyenne du taux d’inflation annuel des prix à la consommation et du taux de variation des coûts de production du lait.

Le taux d’inflation a considérablement diminué au cours de la dernière année. Dans les données les plus récentes du mois d’août, le taux d’inflation était de 2,0 %, comparativement à 4,0 % en août 2023.

La figure 1 montre le coût total estimé pour production de lait. J’ai suivi l’indexation de la CDC décrite dans son étude sur les coûts de production pour estimer et prévoir les coûts de production mensuels. Vous pouvez lire l’étude de 2023 sur ce lien. La figure montre que le coût total a baissé, d’environ 6 % entre l’été 2023 et l’été 2024. Ceci est mon estimation, mais elle ne devrait pas être trop éloignée de ce que le CCL trouvera. La CCL utilisera l’étude de coûts pour 2023, dont la publication est prévue en octobre 2024, pour calculer l’évolution des coûts de production.

Figure 1: Estimation du coût total de production du lait

Selon l’évolution estimée des coûts de production et le taux d’inflation, le prix à la ferme pourrait baisser de 2 % (+2 % x 0.5 + -6 % x 0.5). Toutefois, dans le mécanisme des circonstances exceptionnelles, l’ajustement du prix du lait à la ferme pourrait ne pas suivre la formule. Le mécanisme des circonstances exceptionnelles comporte trois critères :

1. Les parties prenantes en font la demande ;
2. Grande différence entre le taux d’inflation et la croissance des coûts de production (8% ici) ;
3. Les coûts de production estimés dépassent les revenus des producteurs.

Le respect du premier critère dépendra des parties prenantes. Le deuxième critère est rempli. Je ne pense pas que le troisième critère sera respecté. Il semble donc possible que les prix du lait baissent en février 2025. À tout le moins, les producteurs laitiers ne devraient pas s’attendre à ce que la CCL augmente les prix du lait à la ferme en 2025.

Prévisions des prix à la ferme

J’utilise deux modèles pour prévoir les prix du lait à la ferme par province. Voici de brefs détails pour ceux qui sont intéressés.

• Modèles des composantes du lait : C’est le type de modèle que j’ai utilisé dans mon article de février. Les prévisions de prix à la ferme sont fondées sur les prévisions des volumes et des prix par classe de lait.
• Modèles de séries chronologiques : Ces modèles sont un mélange de modèles Elastic-Net et ARIMA.

Les modèles sont estimés séparément pour chaque province. Les modèles de séries chronologiques ont tendance à produire des prévisions plus lisses que les modèles des composantes du lait.

Dans les prévisions, je suppose que la CCL baisse les prix du lait à la ferme le 1er février 2025 de 2 %, conformément à mes calculs ci-dessus. Néanmoins, les modèles prévoient des prix légèrement plus élevés en 2025 par rapport à 2024. Comment est-ce possible? La CCL ne fait qu’influer sur les prix. Les forces de marché domestiques et internationales jouent un rôle important, en particulier en influencant l’utilisation finale du lait.

Provinces matimes

La figure 2 montre que les prix du lait à la ferme varient considérablement d’une province maritime à l’autre. Les modèles de séries chronologiques prévoient que les prix diminueront en août, puis augmenteront pendant le reste de l’automne. Par la suite, les prix baisseront selon la saisonnalité habituelle.

Les modèles des composantes du lait pour le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse prévoient une baisse des prix en août et en septembre, mais une hausse des prix par la suite. La baisse des prix en août et en septembre au Nouveau-Brunswick sont abruptes et je doute qu’elles puissent être aussi fortes. Le modèle des composantes du lait de l’Île-du-Prince-Édouard prévoit que les prix commenceront à augmenter en août.

Figure 2: Prix à la ferme dans les provinces maritimes

Québec et Ontario

Les prix à la ferme au Québec et en Ontario se suivent généralement assez bien, et les modèles prévoient des prix similaires pour les deux provinces. Les prix devraient augmenter tout en suivant les tendances saisonnières. Les modèles des composantes du lait sont plus optimistes quant à l’augmentation des prix au cours de la prochaine année. Les prix devraient être légèrement plus élevés en 2025 mais augmenter à un rythme moins fort que les années précédentes.

Figure 3: Prix du lait à la ferme au Québec et en Ontario

Provinces de l’ouest

Les prix du lait à la ferme dans le Western Milk Pool (WMP) varient d’une province à l’autre. Les prix du lait de la Saskatchewan semblent être plus volatils. Les prix du lait en Alberta et en Colombie-Britannique sont plus élevés qu’au Manitoba et en Saskatchewan et plus élevés que dans les provinces de l’Est. Les prévisions sont similaires à celles du Québec et de l’Ontario : les prix devraient généralement suivre une tendance à la hausse tout en étant saisonniers, ce qui se traduira par une légère augmentation en 2025 par rapport à 2024.

Figure 4: Prix du lait à la ferme dans les provinces de l’ouest

Comparaison des prix du lait de Statistique Canada et des Producteurs de lait du Québec

Dans mon billet de février, j’ai utilisé les données mensuelles des Producteurs de lait du Québec (PLQ), où le prix est mesuré comme la valeur à la ferme d’un hectolitre à la composition moyenne. Mes prévisions dans ce billet utilisent les données du tableau 32-10-0077 de Statistique Canada. Ici, j’examine si les deux sources de données donnent des valeurs comparables.

La figure 5 compare les prix des données des PLQ et de Statistique Canada. La figure montre un écart entre les deux séries, mais qu’elles évoluent de manière synchronisée jusqu’en août 2021. L’écart s’explique principalement par les coûts de transport.

La zone en bleu clair correspond à la période à partir d’août 2021. À partir de cette date, les prix des deux sources ne se suivent plus aussi bien. Ce qui s’est passé en août 2021, c’est que PLQ a introduit une nouvelle méthode de tarification qui incite davantage les producteurs à augmenter la composition relative en matière grasse de leur lait. Ce que je ne comprends pas, c’est pourquoi ce changement a fait en sorte que les prix ne se suivent plus. Les PLQ rapportent une valeur à la composition moyenne. Bien que la tariffication des composantes ait changé, cela ne devrait pas changer le fait que la valeur de la composition moyenne peut être calculée en divisant le revenu total par le volume total de lait. Statistique Canada calcule le prix moyen en sondant les agriculteurs et en leur demandant le prix moyen qu’ils ont reçu, et en utilisant des données administratives. Ainsi, les deux sources devraient produire des valeurs très similaires. Il semble qu’il y ait eu une rupture dans la façon dont le prix moyen est rapporté par les PLQ.

Figure 5: Comparaison des prix à la ferme publiés par Statistique Canada et les PLQ

La figure 5 donne un indice sur la raison pour laquelle mon modèle prévoyait en février une baisse des prix. Les prix rapportés par Statistique Canada ont diminué, conformément à mes prévisions, mais ceux rapportés par les PLQ sont demeurés relativement stables. Dans mon billet précédent, j’avais estimé le modèle à l’aide des données des PLQ et majorité des données dataient d’avant août 2001. Ainsi, mon modèle a prévu les prix comme s’il n’y avait jamais eu de changement dans la façon dont le prix moyen est rapporté, produisant ainsi une prévision plus cohérente avec les données de Statistique Canada. Comme j’utilise les données de Statistique Canada dans ce billet, je ne m’attends pas à ce que ce soit un problème cette fois-ci.