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La dernière fois que j’ai écrit sur les prix des engrais c’était en février. À l’époque, les conditions étaient réunies pour que les prix des engrais diminuent dans les Prairies. Les prévisions tablaient sur des prix des engrais plus bas en 2023 par rapport à 2022, mais toujours environ 20 % plus élevés qu’en 2021. Il est temps de mettre à jour ces prévisions et de vérifier l’exactitude des dernières prévisions. J’utilise aussi cette occasion pour vérifier si les principaux facteurs qui influent sur les prix des engrais en Alberta ont changé.

Permettez-moi tout d’abord un regard sur les données les plus récentes des prix des engrais en Alberta. Ce sont les meilleures données sur les prix des engrais pour le Canada que je connaisse. Malheureusement, je n’ai pas de données sur les prix des engrais dans l’Est du Canada.

Les données de la figure 1 proviennent de Statistics and Data Development Section, Intergovernmental and Trade Relations Branch, Alberta Agriculture and Irrigation et USDA NASS. Les types d’engrais pour l’Alberta sont de l’ammoniaque anhydre (82-0-0) avec service complet et applicateur, l’urée (46-0-0) et l’engrais (11-51-0). Le prix américain des engrais est représenté par un indice (échelle x 10) pour l’ensemble des États-Unis.

Seulement deux mois de nouvelles données des prix des engrais en Alberta ont été publiés depuis mes prévisions de février. Les modèles prédisaient alors que le prix de l’ammoniaque anhydre (82-0-0) en Alberta augmenterait en février, puis diminuerait par la suite, et que les prix des engrais (11-51-0) et de l’urée (46-0-0) diminueraient. Les données montrent que le prix de l’ammoniaque anhydre (82-0-0) a légèrement diminué en février et que les prix des engrais (11-51-0) et de l’urée (46-0-0) ont diminué, mais plus fortement que prévu.

Les modèles prévoyaient des prix plus élevés que ceux observés en mars et avril. Cela provient des scénarios développés qui considéraient des prix du gaz naturel et les tarifs des barges trop élevés par rapport à ceux effectivement observés. Je montre ci-dessous ce qui s’est passé avec ces prix récemment.

La figure 2 montre que les tarifs des barges céréalières vers l’aval à partir de St. Louis. Il s’agit d’une approximation que j’ai construite pour les tarifs des barges vers l’amont sur le fleuve Mississippi, pour laquelle je n’ai pas pu trouver de données.

Les tarifs des barges sur le fleuve Mississippi ont fortement chuté depuis l’automne. Le taux de juin a atteint un creux jamais vu depuis l’été 2021. Si les conditions ne sont pas trop sèches cet été dans les bassins du Mississippi et du Missouri, l’engrais devrait être acheminé du sud des États-Unis vers les Prairies canadiennes à faible coût au cours des prochains mois par rapport à l’an dernier.

La figure 3 montre que la chute des prix du gaz naturel a été spectaculaire. Le prix moyen du gaz naturel au Henry Hub en juin a été bien inférieur à 2 USD/million de Btu, un niveau jamais vu depuis 2020. La courbe des contrats à terme prévoit une hausse des prix du gaz naturel à l’automne et à l’hiver prochains. Il s’agit de la saisonnalité attendue.

Dans mon billet de novembre 2022, j’ai montré que le prix courant est le meilleur prédicteur du prix des engrais le mois prochain. L’importance des prix à terme pour le maïs, des prix du gaz naturel et des barges sur le fleuve Mississippi était beaucoup plus faible. Avec les prix du gaz naturel et les tarifs des barges qui ont monté en flèche à l’automne pour ensuite diminuer, j’ai pensé qu’il valait la peine de réévaluer l’importance des variables pour vérifier si les modèles constatent toujours que ces variables sont importantes.

La figure 4 montre les principaux déterminants de prix des engrais. Le meilleur prédicteur du prix des engrais est le prix du mois précédent. D’autres variables sont beaucoup moins importantes, incluant le prix du maïs, le prix du gaz naturel et le tarif des barges sur le fleuve Mississippi avec des retards. Par rapport au billet de novembre 2022, les modèles sélectionnent des variables similaires, mais les tarifs des barges ont moins d’importance.

Je prédis les prix des engrais à partir de scénarios plausibles pour les variables des modèles. Les trois scénarios sont les suivants :

  • Les taux de change, les prix du pétrole, les tarifs des barges et les tarifs ferroviaires restent à leurs moyennes de juin 2023 jusqu’à présent,

  • Le prix du maïs suit sa courbe des contrats à terme (CCT),

  • Trois scénarios pour les prix du gaz naturel (Henry Hub) :

    • CCT : les prix du gaz naturel suivent leurs CCT.

    • CCT -25 % : les prix du gaz naturel baissent de 25 % par rapport à leurs CCT.

    • CCT +25 % : les prix du gaz naturel augmentent de 25 % par rapport à leurs CCT.

La figure 5 montre les prévisions pour les trois scénarios. Les modèles prévoient que les prix des engrais continueront de baisser. Cela n’est pas trop surprenant compte tenu des fortes baisses des prix du gaz naturel et des tarifs des barges. Ainsi, si les conditions économiques actuelles se maintiennent, nous devrions observer que les prix des trois types d’engrais considérés baisseront au cours des six prochains mois.

Ces prévisions viennent avec une mise en garde étant donné les récents mouvements de prix des engrais aux États-Unis. En effet, les prix de certains engrais étaient plus élevés aux États-Unis à la fin du mois de mai. Néanmoins, les prix des engrais aux États-Unis sont inférieurs d’environ 20 % à ce qu’ils étaient il y a un an.

Les prévisions montrent que les conditions sont réunies pour que les prix des engrais continuent de baisser. En plus de ce qui a été mentionné ci-dessus, les stocks d’engrais en mars, comme le montre la figure 6, soutiendront des prix plus bas.1 Dans l’ensemble, les nouvelles sont bonnes pour les agriculteurs car ils devraient voir leurs coûts en engrais baisser au cours des six prochains mois.


  1. Les stocks d’ammoniaque en 2022 et 2023 sont manquants dans le tableau de Statistique Canada. J’ai inclus dans les inventaires parcellaires pour les NAU comme troisième type d’engrais. ↩︎