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Ceci est le troisième billet, et peut-être du dernier, d’une série sur la cartographie des fermes canadiennes. Dans le premier billet de la série, j’ai montré l’emplacement des fermes par provinces. Dans le deuxième billet, j’ai montré l’emplacement des fermes pour certains secteurs. Dans cet article, je montre comment les fermes et les infrastructures se partagent les terres.

La plupart des gens vivent sur ou à proximité de l’écoumène agricole, qui consiste en des superficies où se déroule principalement l’activité agricole. Historiquement, les villes se sont développées à proximité des routes commerciales et où la nourriture pouvait facilement être produite ou récoltée. De plus, les terres propices à l’agriculture près des villes ont souvent une grande valeur pour le développement résidentiel.

Les infrastructures sont essentielles au secteur agricole. Comme nous le verrons ci-dessous, les infrastructures servent généralement bien les exploitations agricoles étant donné qu’elle couvre l’écoumène agricole. Cependant, compte tenu de la proximité entre les zones agricoles et urbaines, et de la nécessité de développer des infrastructures qui servent plus spécifiquement la population et les intérêts commerciaux autres que l’agriculture, la construction et l’exploitation d’infrastructures peuvent impliquer la perte de terres agricoles, ainsi des désaccords sur la meilleure façon d’utiliser les terres sont inévitables.

Cet article montre comment les infrastructures au Canada couvrent l’écoumène agricole. Une mise en garde est que pour bien montrer les infrastructures, leur taille est disproportionnée dans les figures ci-dessous, et donc elles n’occupent pas autant de superficies que les figures le suggèrent.Les cartes ne permettent pas de commenter les questions d’utilisation des terres qui sont souvent au niveau local. Les données proviennent du gouvernement du Canada et, dans certains cas, leur couverture semble incomplète. Je montre des cartes pour l’ensemble du Canada, mais des données sont disponibles pour produire des cartes à l’échelle provinciale.

Avant de montrer des cartes de l’infrastructure au Canada, je pense qu’il est approprié de se remémorer où sont situées les fermes. Dans la figure 1, chaque point rouge représente une ferme située au hasard dans la subdivision consolidée de recensement à laquelle elle appartient, car je n’ai pas l’emplacement exact des fermes. J’explique comment ce type de carte est produit dans le premier billet de cette série.

La carte montre de plus grandes concentrations de fermes dans le sud de l’Ontario et au Québec le long du fleuve Saint-Laurent. Il y a des fermes partout dans l’écoumène agricole. Observez les taches blanches délimitées par l’écoumène agricole. Ce sont de grandes villes. Les emplacements de Montréal, Ottawa, Toronto, Régina, Edmonton et Calgary sont faciles à identifier.

Figure 1: Carte des fermes au Canada

Carte des fermes au Canada

La carte ci-dessous montre les chemins de fer au Canada d’après des données de Gouvernement ouvert pour le Réseau ferroviaire national. L’histoire du développement du réseau ferroviaire canadien est fascinante et montre à quel point les chemins de fer ont joué un rôle crucial dans le développement économique et la colonisation des régions de l’euest du pays.

Le Canadien National (CN) et le Canadien Pacifique (CP) sont les deux principales compagnies ferroviaires du Canada. Les Producteurs de grains du Canada observent que 94 % du grain canadien est expédié par chemin de fer (en anglais seulement). Il n’est pas surprenant de constater que le réseau ferroviaire couvre bien l’écoumène agricole des Prairies et permet l’exportation du grain par les ports de l’est ou de l’ouest. Dans l’est, les chemins de fer sont moins importants pour l’agriculture en raison des types de productions agricoles, de la proximité de la Voie maritime du Saint-Laurent et du réseau routier existant.

Figure 2: Carte des chemins de fer au Canada

Carte des chemins de fer au Canada

Les élévateurs à grains sont souvent situés le long des voies ferrées et il semble donc naturel de les cartographier tout en montrant le réseau ferroviaire. J’ai obtenu des données sur l’emplacement des élévateurs à grains auprès d’Agriculture Canada par l’entremise de Gouvernement ouvert. Les données de 2021 comprennent l’emplacement de 441 silos, soit deux de plus que les 439 répertoriés par la Commission canadienne des grains. Je suis conscient que tous les élévateurs ne sont pas listés, car les données semblent n’inclure que les élévateurs situés près des chemins de fer.

Les trois types d’élévateurs indiqués sur la carte ci-dessous diffèrent par la catégorie de leurs licences de compagnie céréalière. Les installations primaires reçoivent le grain directement des producteurs pour l’entreposage et l’expédition. Les installations de transformation reçoivent et stockent le grain pour la fabrication et la transformation. Les installations terminales reçoivent le grain d’autres installations pour le nettoyage, l’entreposage et le traitement avant qu’il ne soit expédié ailleurs. La carte montre que la plupart des installations primaires et des installations de transformation se trouvent dans les Prairies. Ailleurs, les élévateurs cartographiés sont terminaux.

Je dois souligner que Statistique Canada offre le Tableau de bord de la chaîne d’approvisionnement des grains : mouvements des grains par chemin de fer en temps réel. En plus d’afficher le réseau ferroviaire et l’emplacement des élévateurs, le tableau de bord indique le nombre de wagons par corridor et le temps qu’ils demeurent immobiles.

Figure 3: Carte des élévateurs à grain au Canada

Carte des élévateurs à grain au Canada

Les données pour les routes cartographiées ci-dessous proviennent de Réseau routier national, rendu disponible par Gouvernement ouvert. Les données semblent contenir toutes les routes numérotées au Canada, et incluent les routes hivernales.

Le réseau routier est vaste et est en grande partie construit sur l’écoumène agricole. En dehors de l’écoumène agricole, il y a des routes principalement pour l’exploitation forestière et minière, et pour desservir les communautés éloignées. Le réseau routier est beaucoup plus dense sur l’écoumène agricole qu’à l’extérieur de celui-ci, et ce particulièrement au Québec et en Ontario. Dans les Prairies, l’écoumène agricole est quadrillé de routes.

Figure 4: Carte des routes au Canada

Carte des routes au Canada

Aucun agriculteur ne souhaite qu’un oléoduc traverse sa ferme. Les oléoducs fournissent un service essentiel à l’économie, mais pas un service direct à l’agriculture. La construction de l’oléoduc Keystone illustre à quel point le développement de ce type d’infrastructure est controversé pour plusieurs raisons, notamment l’expropriation de terres agricoles.

La figure ci-dessous cartographie les oléoducs au Canada à l’aide des données de Ressources naturelles Canada rendues disponibles par l’entremise de Gouvernement ouvert. Il semble y avoir des lacunes dans les données car il y a des discontinuités dans le réseau d’oléoducs.

La plupart des oléoducs se trouvent dans les provinces productrices de pétrole, dans les Prairies et sur l’écoumène agricole. Ailleurs au Canada, il y a moins d’oléoducs, avec quelques oléoducs sur l’écoumène agricole en Colombie-Britannique, en Ontario et au Québec.

Figure 5: Carte des oléoducs au Canada

Carte des oléoducs au Canada

La construction et l’exploitation de lignes électriques est moins controversée que celle d’oléoducs, puisque le risque environnemental associé au transport de l’électricité est moindre que celui du pétrole. Néanmoins, les lignes électriques ne sont pas nécessairement les bienvenues sur les terres agricoles car elles peuvent perturber les activités agricoles et dégrader le paysage.

Les données sur le réseau de transport d’électricité cartographiées ci-dessous proviennent de Ressources naturelles Canada et sont rendues disponibles par l’entremise de Gouvernement ouvert. Les données semblent n’inclure que les lignes de transport d’électricité à haute tension et non les lignes de distribution à plus basse tension. Il y a des lacunes dans les données car il y a des discontinuités dans certaines lignes.

L’une des particularités du Canada est qu’il y a plusieurs centrales hydroélectriques situées au nord, loin des centres de population. Ceci est particulièrement évident au Manitoba, en Ontario et au Québec. Les plus grandes concentrations de lignes électriques se trouvent dans le sud du Québec et le sud de l’Ontario, sur l’écoumène agricole. Ailleurs, la concentration de lignes électriques est beaucoup plus faible.

Figure 6: Carte du réseau de transport d’électricité au Canada

Carte du réseau de transport d’électricité au Canada

Compte tenu de la taille du Canada, il est difficile d’évaluer les distances sur les cartes ci-dessus et, afin de bien montrer l’infrastructure sur les cartes, leur taille est disproportionnée. Néanmoins, les cartes montrent que l’écoumène agricole n’occupe qu’une petite partie des superficies au Canada. Les fermes partagent les terres avec la population, les industries et les infrastructures qui soutiennent l’économie. Inévitablement, cela conduit à des désaccords, à des compromis sur la meilleure utilisation des terres et parfois à des décisions juridiques.

Il est important de protéger les terres agricoles, mais pas à n’importe quel prix. Il est parfois préférable de ne pas exploiter les terres agricoles marginales moins productives ou de les utiliser à d’autres fins que l’agriculture. L’importance économique de certains projets peut justifier la perte de terres agricoles. Quoi qu’il en soit, il est souhaitable d’aborder la conversion des terres agricoles de manière holistique avec une perspective de long terme, en particulier pour les projets qui entraînent une perte irréversible de terres agricoles.